Le président américain Donald Trump s’est prononcé jeudi en faveur de la reconnaissance de la souveraineté d’Israël sur le plateau du Golan. Une décision lourde de conséquences.
« Après 52 ans, il est temps pour les Etats-Unis de reconnaître pleinement la souveraineté israélienne sur le plateau du Golan, qui a une importance stratégique pour l’Etat d’Israël et la stabilité régionale. » C’est par un tweet, comme à son habitude, que Donald Trump a fait prendre à la diplomatie américaine un virage de taille. Territoire syrien de 1.200 km2, il avait été conquis en 1967 par Israël lors de la guerre des Six jours. Depuis, la communauté internationale n’a jamais reconnu cette annexion. Voici pourquoi la nouvelle position de Donald Trump est importante.
Parce que cela appuie le soutient de Donald Trump à Israël
Alors que Benyamin Netanyahou entretenait des relations exécrables avec Barack Obama, le remplacement de ce dernier par Donald Trump a considérablement réchauffé l’ambiance entre les deux alliés. Depuis son investiture, le président américain multiplie les gestes en faveur du Premier ministre israélien. Fin 2017, Donald Trump avait notamment annoncé le transfert de l’ambassade des Etats-Unis de Tel-Aviv à Jérusalem. Celle-ci a été inaugurée le 14 mai 2018.
La sévérité de Donald Trump avec l’Iran et le retrait des Etats-Unis de l’accord sur le nucléaire iranien ont aussi particulièrement plu à Israël.
Sur le dossier palestinien, Donald Trump a systématiquement pris parti pour Israël. Enfin, Donald Trump a déjà reçu Benyamin Netanyahou à deux reprises et il l’accueillera une nouvelle fois à la Maison Blanche, la semaine prochaine.
Parce que ça renforce Benyamin Netanyahou
A un peu plus de deux semaines des élections législatives israéliennes, l’annonce de Donald Trump est une très bonne nouvelle pour Benyamin Netanyahou. « Merci président Trump! », a immédiatement tweeté le Premier ministre israélien après l’annonce de l’ancien homme d’affaires new-yorkais, dont il a loué le « courage ».
Benyamin Netanyahou met inlassablement en avant sa proximité avec Donald Trump et s’en sert d’argument dans sa campagne, présentant les gains israéliens comme des succès personnels dont ses concurrents seraient incapables.
Grandissime favori au début de l’année, Benyamin Netanyahou a vu son avance se réduire avant le scrutin. En cause notamment : sa possible inculpation pour corruption, fraude et abus de confiance dans trois affaires. Par ailleurs, ses deux principaux rivaux, les centristes Yair Lapid et Benny Gantz, ont conclu une alliance pour le faire chuter. Selon les derniers sondages, les deux listes sont au coude à coude.
Parce que ça fragilise encore un peu l’hypothèse d’une paix entre Israël et Palestine
« Honnêtement, c’est peut-être moins difficile que ce que les gens pensent depuis des années. » A son arrivée à la Maison Blanche, Donald Trump n’avait pas caché son optimisme concernant sa capacité à trouver un accord de paix entre Israël et Palestine. Alors qu’il a prévu de présenter son plan après les élections israéliennes, il semble très loin d’arriver à une solution.
En cause notamment, les relations de plus en plus dégradées qu’il entretient avec les Palestiniens. En août, Donald Trump avait ainsi coupé 200 millions de dollars d’aide. Début mars, les Etats-Unis ont décidé de fermer leur consulat général à Jérusalem qui faisait office d’ambassade de fait auprès des Palestiniens depuis les accords d’Oslo dans les années 1990. Il a été absorbé par la nouvelle ambassade à Jérusalem. Avec cette décision, les Etats-Unis sont devenus l’une des seules grandes puissances à ne pas avoir de représentation dédiée auprès des Palestiniens.
La reconnaissance de l’annexion du Golan par Donald Trump fait craindre à certains une future annexion de la Cisjordanie. Cette « déstabilisation » pourrait mener à « un bain de sang », a estimé Saeb Erekat, le négociateur palestinien.
Parce que ça déstabilise la région
Dans une région où l’équilibre tient toujours à un fil, la décision de Donald Trump a fait réagir. La Syrie de Bachar el-Assad a évidemment dénoncé « une violation flagrante du droit international ». « Ces déclarations ne changeront rien au fait que le Golan est et restera arabe et syrien », a poursuivi Damas.
Son allié, l’Iran, s’est également dite « choquée » et a qualifié de « dangereuses » les « décisions spontanées » de Donald Trump. Pour la Russie, « de tels appels peuvent déstabiliser considérablement la situation (…) au Proche Orient. Pour l’instant ce n’est qu’un appel. Espérons que cela le restera ». Bien qu’hostile à Bachar el-Assad, le président turc Recep Tayyip Erdogan a aussi estimé que la déclaration de Donald Trump « met la région au bord d’une nouvelle crise, de nouvelles tensions ».
Parce que ça viole le droit international
Le fait que les Etats-Unis reconnaissent l’annexion du plateau de Golan viole les règles internationales, et notamment les résolutions 242 et 338 des Nations unies. La France a ainsi prévenu que « la reconnaissance de la souveraineté israélienne sur le Golan, territoire occupé, serait contraire au droit international, en particulier l’obligation pour les Etats de ne pas reconnaître une situation illégale ».
Au Caire, la Ligue arabe, qui comprend 22 pays dont l’Egypte, l’Algérie ou encore l’Arabie saoudite, a aussi jugé que la position de l’administration américaine était « dépourvue de toute valeur légale ».
Dorénavant, il va également être difficile pour Washington de reprocher à Moscou d’avoir violé les conventions internationales en annexant la Crimée en 2014, à l’issu d’un référendum jugé illégal. Le risque est ici de créer un dangereux précédent. « Nous ne reconnaissons pas la tentative de la Russie d’annexer la Crimée. Les sanctions contre la Russie resteront en place jusqu’à ce que la Russie rende la péninsule à l’Ukraine », avait pourtant encore affirmé Sarah Sanders, porte-parole de l’exécutif en juillet dernier.