Une nouvelle journée de mobilisation se déroule, ce vendredi en Algérie, pour protester contre la candidature d’Abdelaziz Bouteflika à sa réélection. Voici les quatre chemins que peut prendre le pays dorénavant.
Nouvel épisode de manifestations, ce vendredi en Algérie, pour protester contre la décision du président Abdelaziz Bouteflika de briguer un 5e mandat à la tête de l’Etat. Alors que les manifestations du 22 février avaient rassemblé des dizaines de milliers de personnes dans plusieurs villes du pays, ils sont encore très nombreux à défiler contre le président en poste depuis 1999. Une façon de faire monter encore un peu plus la tension à quelques jours du dépôt officiel de la candidature prévue le 3 mars. Le pays semble avancer, mais dans quelle direction? Que va-t-il se passer après cet élan populaire? Le point sur les quatre scénarios possibles.
1- Le pouvoir étouffe les manifestations
Pour l’instant, le pouvoir en place a peu réagi aux protestations et ne semble pas vouloir reculer sur la candidature d’Abdelaziz Bouteflika qui fêtera ce samedi ses 82 ans. Il parie sur un pourrissement du mouvement avec quelques mesures d’apaisement. Une conférence nationale a notamment été promise et pourrait déboucher sur une réforme constitutionnelle. Il n’est toutefois pas dit qu’elle satisfasse les manifestants dont la colère être centrée sur la personnalité du président.
Alors que le camp présidentiel a fait savoir qu’il n’entendait pas reculer face à la rue, l’interdiction de manifester en vigueur depuis 2001 pourrait aussi permettre au gouvernement d’étouffer les protestations. D’autant plus que les médias algériens, dont la liberté est relative, sont restés très discrets sur les manifestations. La confiance de l’exécutif est d’autant plus renforcée que dans le passé, le pouvoir en place a su résister à des mouvements de contestations comme en 2009, 2011 ou 2013.
Mais pour l’écrivain algérien Kamel Daoud, interrogé sur vendredi sur RTL, « le principal changement, c’est le fait que les gens n’ont plus peur ». Selon lui, « l’écrasante majorité des Algériens ne reculeront plus ». Kamel Daoaud a lui-même participé à la manifestation vendredi.
2- Report des élections
Parmi les plan B vers lesquels pourraient se tourner le pouvoir s’il n’arrive pas à contenir la protestation, on peut citer l’hypothèse d’un report des élections initialement prévues pour le 18 avril. C’est notamment ce que réclame l’opposante Louisa Hanoune, secrétaire générale du Parti des travailleurs (gauche) qui estime que l’Algérie est « dans une phase prérévolutionnaire ». « Je me demande si l’issue ne réside pas dans le report d’un ou deux mois maximum, pas à l’infini, afin de réunir toutes les conditions de démocratie et de transparence », a-t-elle déclaré lundi sur TSA Direct.
Le report pourrait également permettre au pouvoir de gagner de temps pour trouver une sortie de crise et peut-être désigner un remplaçant à Abdelaziz Bouteflika.
3- Retrait de la candidature d’Abdelaziz Bouteflika
Pour l’instant, cette hypothèse est totalement écartée par le système en place. Mais si les manifestations se poursuivent et que l’instabilité gagne le pays, l’armée pourrait appuyer dans le sens d’un retrait. A ce moment-là, c’est un proche de d’Abdelaziz Bouteflika qui pourrait prendre le devant de la scène.
Le nom de son petit frère, Saïd Bouteflika, 61 ans et conseiller spécial, revient régulièrement. Au vu de l’état de santé de son frère, qui a fait un AVC en 2013, certains vont même jusqu’à la considérer comme le président de facto de l’Algérie depuis cette date. Mais reste pour l’instant discret.
Enfin, la solution réclamée par les manifestants est l’organisation d’élections libres mais il y a peu de chances que le pouvoir en place y accède.
4- Scénario « à la syrienne »
C’est un argument qui revient sans cesse dans les discours du pouvoir pour décourager la protestation. Jeudi encore, le Premier ministre Ahmed Ouyahia a mis en garde contre un scénario « à la syrienne », pays en guerre depuis 2011. « Des manifestants heureux ont offert des roses aux policiers. Mais rappelons-nous ensemble qu’en Syrie, ça a commencé aussi avec des roses », a-t-il déclaré devant l’Assemblée populaire nationale. « Je ne parle pas pour faire peur au peuple, non, je ne parle pas pour exploiter le passé », avait pourtant auparavant assuré Ahmed Ouyahia.
Si l’Algérie est encore très loin d’être dans la même situation, l’ombre des révolutions arabes planent forcément dans les esprits. Les situations en Syrie, Libye voir en Egypte sont prises comme des exemples à éviter même parmi les opposants à Abdelaziz Bouteflika. La guerre civile entre 1991 et 2002 a également laissé des traces en Algérie.