Emmanuel Macron a annoncé jeudi soir son souhait de confier aux caisses d’allocations familiales le recouvrement des pensions alimentaires afin d’aider les mères célibataires en situation de précarité. Il s’agirait en fait d’améliorer un mécanisme créé sous François Hollande.
Parmi la batterie de mesures post-grand débat, annoncées jeudi lors de sa conférence de presse, Emmanuel Macron a voulu insister sur la situation des familles monoparentales, en particulier celle des mères célibataires et précaires. Il a ainsi annoncé son souhait de confier aux caisses d’allocations familiales (CAF) le recouvrement des pensions alimentaires afin de lutter contre les impayés et aider ainsi un grand nombre de mères célibataires en situation de précarité. La mesure a aussitôt fait réagir plusieurs responsables socialistes, étonnés qu’Emmanuel Macron ne se souvienne pas d’un dispositif identique mis en place en janvier 2017, sous François Hollande.
Ce qu’a annoncé Emmanuel Macron
« Je veux que nous mettions en place, de manière très rapide, un système où on donnera la prérogative de puissance publique à la Caisse d’allocations familiales, pour qu’elle puisse aller prélever directement les pensions alimentaires dues, quand elles ne sont pas versées », a déclaré le chef de l’Etat devant la presse.
« On ne peut pas faire reposer sur des mères seules qui élèvent leurs enfants (…) l’incivisme de leurs anciens conjoints. Or aujourd’hui, c’est ce qui se passe », a-t-il expliqué pour justifier la mesure.
L’idée de confier ainsi le recouvrement des pensions alimentaires impayées à un organisme public avait été suggérée début mars par le groupe de réflexion Terra Nova. Une proposition que le gouvernement avait alors promis d’étudier avec attention.
Une mesure préexistante?
La sénatrice socialiste et ancienne ministre des Familles Laurence Rossignol a fait part sur Twitter de son étonnement après cette annonce d’Emmanuel Macron : « Sans polémiques et sans nier que le système peut être amélioré, je ne comprends pas la différence entre ce que vient d’annoncer le (président) et ce qui a été mis en place en janvier 2017. »
L’ex-ministre des Droits des femmes et de l’Education Najat Vallaud-Belkacem a, elle, ironisé sur le réseau social :
Najat Vallaud-Belkacem
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@najatvb
Oh wait… serait-ce à dire que d’autres auraient « découvert les familles monoparentales » il y a bien longtemps déjà et -soyons fous- … auraient même déjà mis en place ce qu’il annonce ce soir? Noooon ce ne serait pas sérieux. #conferencedepresse
maxime des gayets
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@mdesgayets
❗️Rappel utile : la loi portée en 2014 par @najatvb avait créé la garantie contre les impayés de pensions alimentaires… ? http://securite-sociale.fr/-Les-Garanties-contre-les-impayes-de-pension-alimentaire-Gipa- … #partisocialiste #ConferencedePresse #AllocutionMacron #grandblabla
En 2014, une loi, portée par Najat Vallaud-Belkacem, avait permis la création d’un système de garantie contre les impayés de pensions alimentaires.
Un dispositif qui, selon le site de la sécurité sociale, vise à aider les familles monoparentales quand un parent ne paie plus, ou partiellement, de pension alimentaire ou quand le montant de la pension versée est inférieur à celui de l’allocation de soutien familial (ASF).
Ce dispositif, généralisé en 2016 à toutes les CAF et à la MSA (la sécurité sociale agricole), est piloté par un organisme public, lui aussi créé sous François Hollande début 2017 : l’Aripa.
Qu’en est-il aujourd’hui?
Malgré l’existence de l’Aripa, la situation reste alarmante à en croire Terra Nova et l’actuel gouvernement.
Il s’agit d’un sujet « d’angoisse et de conflit pour trop de familles monoparentales », avait observé devant les députés Christelle Dubos, secrétaire d’État auprès de la ministre des Solidarités, soulignant qu' »un million de familles bénéficient d’une pension alimentaire, mais 20 à 40% ne la perçoivent pas, soit totalement, soit partiellement ».
Selon Terra Nova, les impayés de pension alimentaire constituent une situation « d’autant plus inacceptable » qu’elle concerne « souvent des personnes modestes » qui « utilisent encore trop rarement les procédures de recouvrement qui sont à leur disposition, soit qu’elles ne les connaissent pas, soit que la complexité administrative les rebute, soit qu’elles redoutent d’ouvrir un conflit avec leur ex-conjoint ».
Interrogée sur BFMTV et Franceinfo, Marlène Schiappa, la secrétaire d’Etat chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, a d’ailleurs évoqué cette « complexité administrative », notant qu’avec le dispositif de 2017, « de nombreux objectifs ne sont pas encore atteints ».
« Les ateliers [lors du grand débat] ont montré que le dispositif actuel n’est pas suffisamment accessible, rapide, efficace », a ainsi avancé la responsable sur Franceinfo.
« Le gouvernement veut désormais aller plus loin et garantir un dispositif efficace », a-t-elle par ailleurs résumé dans un communiqué, également publié jeudi soir.
Selon l’Insee, 1,7 million de familles sont monoparentales, soit plus d’une sur cinq (22%) – un taux qui a plus que doublé en 40 ans. Dans 85% des cas, la mère est la cheffe de famille. Environ 32,5% de ces familles vivent sous le seuil de pauvreté et 20% des bénéficiaires du RSA sont des mères isolées.