Plusieurs responsables européens, à commencer par Emmanuel Macron et Angela Merkel, sont prêts à concéder au Royaume-Uni un nouveau report – sous conditions – du Brexit au-delà de la date prévue du 29 mars prochain.
« Si le Royaume-Uni a besoin de plus de temps, il est évident que nous ne refuserons pas. » C’est en ses termes que la chancelière allemande Angela Merkel, en déplacement mercredi à Paris, à commenter la demande de la Première ministre britannique Theresa May de reporter le Brexit, qui doit être effectif le 29 mars prochain. Lors d’une conférence de presse commune avec son homologue allemande, Emmanuel Macron a, lui, donné un feu vert sous conditions : « Si les Britanniques ont besoin de davantage de temps, nous pourrons examiner une demande d’extension, si elle est justifiée. »
Le président français refuse ainsi que ce report soit motivé par la renégociation de l’accord de retrait scellé en novembre entre la Commission européenne et les autorités britanniques. Mercredi, le chef du gouvernement espagnol Pedro Sanchez était sur la même position, observant que le report, s’il a lieu, doit se faire dans « une perspective claire de règlement ».
Négociateur pour l’UE dans ce dossier, le Français Michel Barnier a quant à lui rappelé sur France Info que « s’il y a une demande de prolongation [de la période transitoire], elle devra faire l’objet d’une validation à l’unanimité » des pays européens. Et de rappeler que l’un des enjeux sera la durée de cette prolongation.
Un report de trois mois, jusqu’à fin juin
Theresa May s’est engagée mardi devant le Parlement britannique sur une procédure par étapes, avec trois votes clés :
Le 12 mars, sur l’accord de retrait scellé avec l’UE ;
Le 13 mars, sur une sortie sans accord, c’est-à-dire un « Brexit dur » ;Le 14
mars, sur la demande d’un report de la date du Brexit, aujourd’hui fixée au 29 mars donc.
La Première ministre britannique propose un report de trois mois, jusqu’à fin juin donc. Ce qui permettrait au Royaume-Uni de ne pas avoir à élire de députés lors des élections européennes du 26 mai, la session constitutive du Parlement européen ayant lieu la première semaine de juillet.
Même en cas d’approbation, le 12 mars, de l’accord de retrait, un court report sera de toute manière nécessaire, car il faudra au moins huit semaines pour la mise en oeuvre des nouvelles législations, notamment celles concernant l’agriculture, la pêche et l’immigration, fait valoir à l’AFP l’entourage des négociateurs européens.
Un report de 21 mois, jusqu’en 2021
Selon le Guardian, des dirigeants européens étudieraient toutefois la possibilité d’un report de 21 mois, jusqu’au 1er janvier 2021 donc (ou jusqu’au 31 décembre 2020). « Remplacer la période de transition de 21 mois par une prolongation de l’appartenance du Royaume-Uni à l’UE leur permettrait de développer leurs plans relatifs à la relation future [entre les deux parties] avec l’objectif de rendre inutile le controversé ‘backstop’ irlandais », a écrit le quotidien britannique sur son site dimanche soir.
Bruxelles, ajoutait le Guardian, est déterminée à éviter une prolongation courte qui ne ferait que renvoyer le sujet à l’été prochain. Dans une analyse publiée mardi par le European Policy Centre (EPC), un important et influent think tank bruxellois, Larissa Brunner et Fabian Zuleeg avancent que cette extension permettrait d’organiser au Royaume Uni de nouvelles élections législatives ou un deuxième référendum.
L’hypothèse d’une prolongation au-delà de juin a été écartée par Theresa May. A Bruxelles, l’idée fait également débat. Le référent Brexit au Parlement européen Guy Verhofstadt a ainsi rejeté mercredi cette option. « Si Theresa May demande l’extension de la période de négociation […], cela ne peut pas durer plus de quelques mois afin qu’une majorité multipartite puisse être trouvée. Certainement pas 21 mois », a-t-il soutenu dans un post Facebook.
Si Guy Verhofstadt évoque le problème du renouvellement du Parlement européen, avec le scrutin du 26 mai, les analystes de l’EPC rappellent un autre enjeu : le Royaume-Uni, en restant encore 21 mois dans l’UE, devra payer de nouvelles contributions budgétaires.