Début Economie Affaire Benalla : au Sénat, nouveau moment de vérité pour l’exécutif et l’ex-collaborateur de Macron

Affaire Benalla : au Sénat, nouveau moment de vérité pour l’exécutif et l’ex-collaborateur de Macron

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La commission d’enquête du Sénat sur l’affaire Benalla va auditionner mercredi les ministres Christophe Castaner, Jean-Yves Le Drian ainsi que le directeur de cabinet d’Emmanuel Macron, Patrick Strzoda. Elle entend obtenir des explications après la révélation fin décembre de l’utilisation de passeports diplomatiques par l’ancien chargé de mission de l’Elysée, qui sera également de nouveau entendu.

Au Sénat, la saison 2 de l’affaire Benalla commence mercredi. La commission d’enquête sénatoriale reprend ses auditions pour faire la lumière sur les nouvelles informations concernant les passeports diplomatiques de l’ancien chargé de mission de la présidence, Alexandre Benalla, et d’éventuels dysfonctionnements au niveau de l’exécutif. Trois figures du gouvernement et de l’Elysée sont attendues au palais du Luxembourg, avant l’ex-collaborateur d’Emmanuel Macron lundi prochain. Il s’agit des ministres Christophe Castaner (Intérieur) et Jean-Yves Le Drian (Affaires étrangères) et du directeur de cabinet du chef de l’Etat, Patrick Strzoda.

Cette nouvelle série d’auditions n’était pas prévue. Après 28 auditions entre juillet et octobre, le rapport de la commission du Sénat sur le rôle précis d’Alexandre Benalla dans la sécurité d’Emmanuel Macron, après ses actes de violences commis en marge de la manifestation du 1er mai et révélés par Le Monde en juillet, était attendu. Sa mission d’enquête de six mois doit de toute façon se terminer le 24 janvier.

La commission sénatoriale demande à l’exécutif des « explications »
Mais les voyages en Afrique de celui qui est désormais reconverti dans les affaires, en particulier celui au Tchad effectué peu avant le Président, ont semé le trouble. D’autant que l’homme de 27 ans avait toujours en sa possession des passeports diplomatiques obtenus lorsqu’il était encore à l’Elysée, qu’il a finalement restitués la semaine dernière comme il s’y était engagé fin décembre dans le JDD.

La commission a donc formellement demandé fin décembre des explications à l’Elysée et au gouvernement sur « les conditions dans lesquelles M. Alexandre Benalla a pu faire usage de passeports diplomatiques » après son licenciement en juillet. « En fonction des informations qui nous seront transmises, nous apprécierons s’il y a lieu de procéder à de nouvelles auditions voire de saisir la justice », ont indiqué le président de la commission, Philippe Bas (LR), et les rapporteurs Muriel Jourda (LR) et Jean-Pierre Sueur (PS), avant donc de procéder effectivement à ces nouvelles convocations.

Qu’il s’agisse d’Alexandre Benalla, de Patrick Strzoda, de Christophe Castaner ou de Jean-Yves Le Drian, les sénateurs tenteront de faire la lumière sur plusieurs nouvelles zones d’ombre, même s’ils ne peuvent empiéter sur la seconde enquête ouverte par la justice le 29 décembre, pour « abus de confiance » et « usage sans droit d’un document justificatif d’une qualité professionnelle ». Voici les principales interrogations qui demeurent :

1 – Pourquoi Benalla avait-il encore ses passeports?
L’ancien collaborateur d’Emmanuel Macron a-t-il gardé ses passeports après son licenciement? Lui assure les avoir restitués à la fin du mois d’août aux services de l’Elysée. Cela expliquerait pourquoi il avait déclaré, sous serment, lors de sa première audition devant le Sénat le 19 septembre, que ces documents devaient se trouver encore dans son ancien bureau élyséen.

Puis, toujours selon Alexandre Benalla, un « membre de la présidence » lui a restitué début octobre les fameux passeports avec d’autres effets personnels dans une pochette. La scène se serait passée dans une rue près du palais présidentiel. Cette remise est-elle une faveur faite par Alexandre Benalla ou une erreur? Et qui a exactement repris contact avec lui? Ce seront sans doute des questions posées par le sénateur.

2 – Quelle a été l’attitude du Quai d’Orsay?
Le ministère des Affaires étrangères, qui délivre ce type de passeports (ceux-ci sont toutefois gérés par l’Agence Nationale des Titres Sécurisés, qui dépend de l’Intérieur), a-t-il suffisamment insisté pour les reprendre après le licenciement d’Alexandre Benalla? Sitôt l’information révélée par Mediapart, le 27 décembre, l’Elysée a en tout cas rapidement renvoyé vers lui, le Quai saisissant de son côté le procureur de la République…

Les services diplomatiques français expliquent avoir officiellement réclamé ces passeports à Alexandre Benalla le 26 juillet, en vain. N’avaient-ils aucun moyen de savoir que l’ancien chargé de mission continuait de les utiliser? Lui-même a assuré à Mediapart que « l’ambassade de France » des pays dans lesquels il se rendaient devaient être au courant, des propos jugés « fantaisistes » par le Quai. En outre, pourquoi les services n’ont-ils tout simplement pas procédé à la désactivation des passeports pour en interdire tout usage?

3 – Pourquoi Alexandre Benalla a-t-il reçu un passeport après sa mise à pied?
Le Quai a par ailleurs précisé qu’Alexandre Benalla s’était bien « engagé par écrit le 23 mai 2018 à restituer ces documents à la fin des fonctions qui en justifiaient l’attribution », renvoyant ainsi la faute sur lui. On était alors à la veille de la remise de l’un des deux passeports en question. Mais pourquoi le chargé de mission s’est-il vu attribuer ce document trois semaines après sa mise à pied de la part de l’Elysée, pour sa participation aux manifestation du 1er mai côté forces de l’ordre? Alexandre Benalla avait même vu son champ d’action être réduit à la sécurité puisqu’il n’était plus censé participer aux déplacements officiels du Président?

« J’ai peut-être eu tort de me servir de ces passeports, reconnaissait auprès du JDD Alexandre Benalla. Mais je tiens à dire que je ne l’ai fait que par confort personnel, pour faciliter mon passage dans les aéroports. En aucun cas je ne les ai utilisés pour mes affaires. Je ne vois d’ailleurs pas à quoi ils auraient pu me servir… »

4 – Alexandre Benalla faisait-il déjà des affaires depuis l’Elysée?
Les sénateurs entendent demander des éclaircissement sur d’éventuelles activités privées, notamment dans le domaine de la sécurité, réalisées par Alexandre Benalla ou Les sénateurs entendent toutefois bien demandé des éclaircissement sur d’éventuelles activités privées, notamment dans le domaine de la sécurité, réalisées par Alexandre Benalla ou Vincent Crase, ex-employé de La République en marche qui sera également entendu lundi prochain, lorsqu’ils étaient en fonction à l’Élysée.

L’intéressé rejette catégoriquement toutes affaires de ce type, mais la présidence en a la crainte. C’est pourquoi, dès les informations du Monde, le directeur de cabinet Patrick Strzoda lui adresse un courrier dans lequel il affirme que l’Elysée ne pourrait « laisser sans réaction l’existence de relations d’affaires en France ou à l’étranger avec des intérêts privés, tout à fait incompatibles » avec ses anciennes fonctions. Le haut-fonctionnaire lui demandait de fournir « toutes informations pertinentes à ce sujet ainsi que sur les rémunérations que vous auriez reçues directement ou par personnes interposées au titre de ces missions ».

Indigné, l’ancien chargé de mission s’en était pris au même moment à « certaines personnes de l’entourage d’Emmanuel Macron », les accusant de vouloir « saccager » sa vie. « Je ne me tairai plus », menaçait-il. Et contre-attaquant, Benalla assurait notamment qu’il n’était pas possible qu’on lui ait rendu ses passeports en octobre sans l’aval « a minima » de Patrick Strzoda.

5 – Quel lien garde-t-il avec Emmanuel Macron?
Alexandre Benalla comme l’Elysée ont répété en décembre que les voyages africains du premier n’avaient aucun lien avec l’activité d’Emmanuel Macron et que celui-ci ne représentait que lui-même. Alexandre Benalla avait toutefois révélé auprès de Mediapart avoir continué à échanger des SMS avec le chef de l’Etat, ce que démentait initialement la présidence auprès du Monde. A le croire, il aurait notamment été sollicité pour donner son avis sur « des thématiques diverses », y compris les Gilets jaunes.

L’Elysée a finalement confirmé qu’Emmanuel Macron avait bien échangé à deux reprises avec lui, mais que c’était le Président qui avait décidé de répondre « de manière laconique » à des messages souvent « lunaires » de la part de Benalla. Le chef de l’Etat a notamment assuré à des proches, selon Le Canard enchaîné, que le jeune homme essayait de « monnayer une prétendue proximité avec [lui] » pour développer ses propres affaires.

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